L’Habitat ailleurs: La case traditionnelle Kanak

La case ronde traditionnelle kanak 

La case ronde est l’élément architectural endogène du pays kanak. On la trouve partout, elle fait office de lieu de cérémonies, de lieu de vie ou encore elle sert de local annexe. Endogène, la case ronde l’est à plusieurs titres. Elle est la traduction physique et matérielle de la culture mélanésienne et des rapports sociaux au sein du clan. C’est un espace collectif de vie, propice aux palabres, aux échanges et au maintien d’un esprit communautaire. L’ossature de l’unique porte d’environ 1,50 m, oblige le visiteur qui rentre ou qui sort à être vu et à s’abaisser en signe de respect envers les habitants de la case. La structure porteuse, composée des poteaux, est représentative des lignées du clan qui se fédèrent autour du poteau central symbolisant le chef de clan (ou le grand chef).

Chaque pièce de bois, où qu’elle se trouve dans la construction, a une utilité. Tout comme chaque membre du clan a une place et une fonction dans l’édifice social. Les liaisons représentent des alliances, les rapports entre les membres de la communauté. 

Des pièces sculptées (chambranles, poteaux, etc.) se rapportent aux ancêtres protecteurs des lieux et de la vie des habitants. 

Une architecture adaptée 

C’est une architecture parfaitement intégrée au climat du pays et prévue pour résister le mieux possible aux cyclones. Sa morphologie extérieure, composée de formes arrondies et aérodynamiques offre peu de prise au vent quelles que soient leurs directions. Les lianes maintenant la structure assurent une certaine flexibilité à l’édifice et fonctionnent comme de véritables nœuds articulés qui répartissent sur plusieurs directions les efforts de pression en atténuant leurs effets. Les fortes pentes de la toiture végétale en paille assurent un écoulement rapide des eaux de pluie et évitent une stagnation et l’éventuel pourrissement de la couverture. La paille a aussi pour effet de maintenir une température quasi constante toute l’année. Un foyer permet de réchauffer les nuits et les périodes fraîches et aide également à maintenir l’ossature au sec.

Les matériaux choisis 

La case ronde est aussi endogène par la provenance des matériaux qui la constituent. Elle est entièrement construite avec des matériaux végétaux récupérés dans la réserve forestière environnante. Ainsi, d’une région à l’autre en fonction de la disponibilité des espèces végétales recherchées, on pourra trouver des différences dans la nature des matériaux utilisés. 

La paille, pourra être remplacée par des feuilles de cocotier, de pandanus ou des peaux de niaouli. Les poteaux peuvent être en houp dans une région, ou encore en gaïac dans d’autres régions. Les espèces végétales composant la construction de la case sont choisies en fonction de deux éléments intimement liés, les caractéristiques physiques de l’espèce, et sa fonction dans l’édifice.

Par exemple, la construction d’une case à Lifou fera appel aux espèces mentionnées ci-après, suivant l’ordre chronologique des étapes de la construction.

  • Le poteau central (Inatr en langue) et les poteaux du tour de la case (sinefeni), éléments porteurs et de fondation de tout l’édifice, seront choisis parmi les espèces de bois résistant, dur et imputrescible (pô,trelewegeth, hmu…).
  • Les têtes de poteaux du tour de case sont reliées entre elles par une poutre circulaire (Pane wagôningon) choisie dans les essences élancées fibreuses et aisément pliables (hmejez).
  • Sur cette poutre circulaire viennent s’appuyer les arbalétriers (jo) en bois léger porteur (Gôlep, gae, hmetrewen) qui vont se fédérer au faîtage autour du poteau central.
  • Des pannes raidisseurs circulaires (wangoningon) de la même espèce de bois que la poutre circulaire et fixées sur les arbalétriers à intervalles réguliers d’environ un mètre soutiendront le quadrillage de gaulettes (hna fini), support de la couverture.
  • La couverture (hna jez du nom de l’herbe de paille qui la constitue) sorte de matelas dense fortement appliqué et liaisonné à l’ossature pour assurer une bonne étanchéité à l’eau, est constituée soit d’herbes de paille (jez), soit de feuilles de cocotiers (hna drohnu).
  • Les assemblages entre les divers éléments de la construction sont réalisés grâce à différents types de lianes (hna otretr) choisis en fonction des fixations à entreprendre.
  • A l’intérieur de la case un foyer est aménagé à même le sol entre l’entrée et le poteau central et délimite un espace de vie collective tapissé de nattes tressées en feuilles de pandanus (ixoe), posées sur un matelas de feuilles de cocotier (behno). Ce matelas est isolé du sol naturel par des matériaux absorbants ou spongieux (pierre ponce, etc.) évitant ainsi les remontées d’humidité.

Un ouvrage collectif 

Enfin, la case est endogène par son mode d’auto-construction collective.

La construction d’une case est toujours une œuvre collective. Elle mobilise l’ensemble de la communauté dans cette entreprise d’auto-construction où chaque groupe contribue par des tâches précises et prédéterminées depuis la nuit des temps. 

Aux hommes, la coupe, le transport sur le site de tous les éléments composant l’ossature bois et également les travaux de construction de la case. 

Aux femmes, l’arrachage et le transport sur le site de la paille de couverture. 

Aux anciens, la préparation des lianes d’assemblage, les sculptures, le décorticage de certains bois et gaulettes. 

Il faut savoir, qu’à différentes étapes de la construction de la case (début des travaux, pose couverture et linteau de porte et de l’anneau de faîtage) des gestes coutumiers sont exécutés pour matérialiser les éléments importants symboliques de la case et assurer sa pérennité et le bien-être futur de ses occupants. 

Auteur de l’article : Mickael Cantello

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